Ce mercredi 20 novembre, une Réunion d’Information Préalable (RIP) s’est tenue dans le hall de l’aéroport de Bierset, concernant le projet d’extension de la dalle nord-est. Cette RIP marque la première étape annoncée du Master Plan 2040 de l’aéroport. Présentée comme telle et martelée tout au long de la réunion, cette annonce semble aller un peu vite, non ?
Fontaine et Cahotte, cela vous dit quelque chose ? Et la route de contournement ? Cainiao ? La démolition des anciennes infrastructures de Cubber ? La création d’une canalisation reliant Cubber à Jemeppe ?
De mon point de vue, ce Master Plan a déjà bien commencé. Ce que nous voyons ici n’est qu’une partie de ce qui nous attend à l’avenir.
Une soirée mouvementée
Revenons à la soirée. À ma grande surprise, le service d’ordre était plus discret que lors de la RIP d’Alibaba. En revanche, la salle était bien plus remplie, avec même des participants debout. Sur l’espace réservé à la réunion, seule la moitié était équipée de chaises, bien que, d’après les commanditaires eux-mêmes, 600 000 toutes-boîtes aient été envoyées. Une preuve que Liège Airport sait pertinemment qu’il dérange, même au-delà des frontières ?
Cependant, je tiens à souligner la bonne organisation de la soirée, notamment la présence d’une cabine de traduction pour les néerlandophones, qui pouvaient suivre la réunion via oreillette. Je salue également l’excellente prestation de la médiatrice, qui a su garder son calme et faire preuve d’un certain sens de l’humour tout au long des débats. Bref, tout semblait mis en place pour que le message passe.
Mais justement, quel message ?
C’est là que réside le problème : il n’y avait tout simplement pas de message. Une coquille vide, sans réelle explication. Certes, nous avons eu droit à des cartes (sans échelle ni représentation des villages), des documents et des procédures (purement théoriques et vides de sens), mais rien de vraiment nouveau par rapport à ce que nous savions déjà (voir cet article de Sudinfo).
Même en ce qui concerne les entrepôts, bien que les différents hangars aient été mentionnés, notamment un de maintenance (sur lequel il y aurait beaucoup à dire), ceux-ci ne faisaient pas partie de l’étude. Nous étions simplement là pour parler de la dalle. De quoi rester sur sa faim.
Une approche trompeuse
Je pense que si le débat avait commencé par : « Nous allons construire une dalle de béton de plus d’un kilomètre de long et 200 mètres de large », le discours aurait été tout autre, et le public, beaucoup moins docile.
Mais, comme toujours, et pour des raisons “pratiques”, Liège Airport découpe le projet en différentes phases et présente les surfaces de manière fragmentée, sans jamais réellement dévoiler l’ampleur à ceux qui ne sont pas déjà bien informés.
Pour vous donner un ordre de grandeur : faire le tour de cette dalle à pied prendrait près de 40 minutes. C’est un projet colossal, qui est pourtant passé presque inaperçu, comme une lettre à la poste.
Mais pourquoi fragmenter ce projet jusqu’en 2032 ? Pour des raisons techniques et de suivi de chantier, dira Liège Airport. Moi, j’ai une autre théorie : même Liège Airport ne sait pas aujourd’hui si cette dalle verra le jour.
Qui peut prédire ce que sera la logistique en 2032 ? Au-delà du cahier des charges, peut-être que Liège Airport lui-même doute d’aller au bout du projet. Mais, par précaution, on prévoit quand même cette dernière dalle… pour dans huit ans.
Un auteur d’étude qui pose question
L’auteur de l’étude, c’est le même bureau qui a réalisé l’EIE (étude d’incidences environnementales) pour l’obtention du permis de Liège Airport.
Est-ce un choix délibéré ? Un marché public ? Un manque d’autres bureaux d’études disponibles ? Cela soulève des questions.
Attention, je ne remets pas en cause les compétences de l’auteur de l’étude, qui a à plusieurs reprises justifie, à juste titre, son travail en respectant le cadre légal.
Mais peut-être est-ce là le vrai problème : le cadre légal. Ne serait-il pas temps de le repenser et de l’adapter à des normes plus actuelles et rigoureuses ?
Une soirée sans vraie présentation
En résumé, cette soirée de « présentation » n’a, au final, rien présenté.
Cependant, elle a réuni un public nombreux et déterminé, prêt à en découdre.
La réunion a commencé par une présentation censée durer une heure (en réalité 45 minutes), suivie de plus d’une heure de débats, tant les questions étaient nombreuses face au manque criant d’informations, tant aujourd’hui que depuis des années.
Des questions sans réponses
Les sujets abordés étaient variés : pollution, hydrologie, bruit… Mais ils n’ont trouvé que peu, voire pas de répondants.
Sur un plan personnel, une révélation m’a marqué : habitant à 2 km de Bierset, j’ai appris pour la première fois que les vibrations dues au survol des avions ne sont pas calculées. Seul le bruit est modélisé mathématiquement. Je comprends mieux maintenant pourquoi mes bibelots bougent tout seuls.
D’autres questions ont émergé sur le bruit rampant, les activités de manutention, les moteurs auxiliaires (APU ou GPU), et tout ce qui arrivera avec l’ajout de parkings.
Une avancée… et des oublis
Certains points ont été mentionnés, comme la ligne 400 Hz qui sera intégrée à la dalle pour réduire l’utilisation des GPU, ce qui est une bonne chose.
En revanche, aucune mention du remplacement des Push-Back par des Taxi-Bots, une innovation potentiellement intéressante pourtant.
Rien non plus de concret sur les mesures d’effarouchement, pourtant cruciales.
Pas un mot non plus sur la pollution aux particules fines, pourtant liée à l’augmentation du nombre d’avions. Si vous ajoutez plus de parkings, cela signifie non seulement plus d’avions, mais aussi plus de camions.
Une personne a cependant posé une question essentielle : le bien-être des camionneurs. Aujourd’hui, ils sont contraints de se garer « où c’est possible » pour effectuer leurs pauses obligatoires, laissant souvent derrière eux des déchets, faute d’infrastructures adaptées.
Je m’attendais à une réponse claire concernant les projets Jolive et Cubber en Bois, mais il n’y a eu que des approximations et des réponses vagues, comme : « on va mettre des parkings avec commodités ». Pourtant, ces projets sont inclus dans le Master Plan. S’agit-il d’un manque de connaissance ou d’une volonté délibérée de ne pas présenter les projets annexes ?
Une déclaration qui interpelle
Enfin, et je m’arrêterai là, tant il y aurait de choses à dire : ce monsieur du public qui a demandé si les avis des citoyens seraient réellement pris en compte.
La réponse du responsable de l’administration de Grâce-Hollogne a provoqué un malaise immédiat :
Il a assuré être le garant de la procédure, veillant à bien transmettre les demandes et avis des citoyens. Mais il a également reconnu, et c’est une première, que les avis sont rarement intégrés ou pris en compte.
Un silence gênant a suivi à la tribune, avant qu’il ne conclue fermement : « Il faut dire la vérité. »
Je tiens à saluer ce monsieur pour son courage : il a osé dire tout haut ce que tous les citoyens vivent depuis longtemps.
Une réunion de plus, où, malgré les interpellations, y compris celles du bourgmestre de Fexhe, on a l’impression qu’il ne s’agit que de cocher une case dans un dossier pour pouvoir passer à l’étape suivante.
Un goût amer me reste en bouche, alors que les premiers flocons tombent en masse sur l’aérogare.
Une opinion de Luc Joachims