Communiqué du 1er juin 2017

Les dernières semaines auront vu à Liège naître une mobilisation citoyenne importante contre la présence massive de la publicité commerciale sur le territoire de la Ville.  En effet, alors qu’arrivait à échéance le contrat liant la Ville à la multinationale JCDecaux, pas moins de 4000 Liégeois ont signé l’appel lancé par le collectif « Liège sans pub » qui demandait à la ville de ne pas souscrire de nouveau contrat.

Dans un contexte de sous-financement chronique des grandes villes, le Collège n’a pas entendu cette mobilisation importante, hâtant même la signature d’un contrat qui lie désormais la Ville à la multinationale JCDecaux pour quinze années supplémentaires et ce contre 50 millions d’euros.

Dans un contexte similaire, la Ville de Grenoble avait au contraire en 2014 décidé de ne pas renouveler son contrat avec JCDecaux, compensant le manque à gagner par une réduction des frais protocolaires et la suppression de voitures de fonction.

Est-ce le rôle de la publicité de financer nos communes ?  Qui paye in fine le coût de la publicité ?  Est-elle sans impact social et écologique ? Le Mouvement Demain  (mouvement politique né de la rencontre du mouvement VEGA et du Mouvement de Gauche) tient à rappeler quelques faits.

La publicité favorise les multinationales, aux dépens des artisans, de l’économie locale et solidaire.  A titre d’exemple et sans même prendre en compte les coûts liés à la réalisation et à l’impression des affiches, pour à peine 12 panneaux de 2m2 et une semaine d’affichage sur Liège, la multinationale JCDecaux demande 2500 euros.  Cela signifie que seuls des grands groupes peuvent s’offrir des campagnes publicitaires de masse.  En 2016, les principaux annonceurs publicitaires étaient d’ailleurs les multinationales Procter & Gamble Benelux, D’Ieteren Group (soit Volkswagen), Proximus, Unilever et Coca-Cola.  De façon synthétique, la publicité favorise donc la nourriture industrielle, la voiture et la téléphonie mobile.

La publicité est toujours davantage massive et invasive.  Selon les données de l’UBA (Union Belge des Annonceurs), les annonceurs ont investi au total 4.1 milliards d’euros en 2016, dont 43% à la télévision et près de 10% dans l’espace public.  Ce chiffre ne cesse de croître (+150% sur 12 ans) et représente désormais 1% du PIB belge.  C’est une somme absolument colossale !

Le consommateur paye la facture qui constitue une forme de taxe déguisée. Ainsi que diverses études l’ont montré, la somme que les industriels consacrent à la publicité de leurs produits est directement répercutée sur le prix de ceux-ci.  En d’autres termes, même s’ils en sont peu conscients, ce sont les consommateurs qui payent la facture, forme insidieuse de « cotisation publicitaire ».  Et celle-ci n’est pas mince puisqu’à la lumière des derniers chiffres, elle s’élève en Belgique à environ € 370 par personne et par an. Les seuls 950 panneaux de 2m2 concédés à la multinationale JCDecaux par la Ville de Liège (et qui vont rapporter à JCDecaux 10 millions d’euros par an payés par les annonceurs, et partant par les consommateurs que nous sommes), correspondent ainsi à une taxe déguisée de 50 euros par an et par habitant, quand ce que verse JCDecaux à la Ville correspondra en moyenne à 16 euros par an, soit trois fois moins.

La publicité initie un cercle écologiquement vicieux. Elle crée artificiellement l’envie d’acheter chez le consommateur. Selon une étude réalisée pour l’UBA, chaque euro investi en publicité en rapporte cinq à l’annonceur via l’augmentation de ses ventes.  Les conséquences de cette logique boulimique sont catastrophiques : surproduction, surconsommation, endettement,…  Plus le budget publicitaire augmentera, plus les conséquences sociales et écologiques seront importantes, plus également la pression que le monde marchand exerce sur nos médias sera importante, plus enfin la marchandisation de chaque parcelle de notre société s’accentuera.

Dans ce contexte le Mouvement Demain propose plusieurs pistes afin de lutter contre l’invasion publicitaire et ses conséquence sociales, sociétales (notamment une image souvent dégradée de la femme) et environnementales.

Au niveau fédéral et régional, il s’agit de réglementer strictement la publicité : Interdire la publicité dans les lieux publics (voirie, écoles, gares, moyens de transport public,…), interdire la publicité à destination des plus jeunes et contrôler son contenu grâce à des organismes indépendant.  A cela il faudrait sans doute ajouter l’interdiction pure et simple de la publicité pour certains produits socialement et écologiquement nuisibles (voitures de type 4×4, crédits, vols low-cost,…), au même titre que pour le tabac. Pour les Rouges-Verts, il conviendrait enfin de créer un jury d’éthique publicitaire indépendant (l’actuel est composé pour et par des publicitaires) et qui puisse stopper certaines campagnes nuisibles avant leur diffusion et non après coup.

Au niveau local, il faut multiplier les initiatives d’interpellation citoyenne qui comme celle née à Liège permettent de mettre en lumière les enjeux de société liés à la publicité et de faire pression sur les autorités communales pour qu’elles renoncent aux contrats qui les lient à des multinationales comme JCDecaux.

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