L’état des canalisations d’eau bruxelloises est en débat depuis l’effondrement d’une voirie ayant causé une inondation majeure à Bruxelles la semaine dernière. Qu’en est-il en région liégeoise ? La régionale de Liège du Mouvement Demain s’est penchée sur la situation à la CILE, l’intercommunale qui gère la captation et la distribution d’eau pour plus de 562.000 personnes dans l’agglomération liégeoise.
La situation y est tout sauf rassurante. Le taux de renouvellement des canalisations ne cesse de baisser. Au taux de 2016, soit 0.2%, il faudrait 500 ans pour renouveler l’ensemble des canalisations ! [1] La durée de vie d’une canalisation est pourtant estimée entre 30 et 80 ans. En conséquence, le réseau est de plus en plus vétuste et les pertes grimpent à un niveau record. En 2016, à peine 73% de l’eau captée et traitée a été distribuée. A titre de comparaison, le rendement du réseau Eau de Paris est de l’ordre de 92%.
Ceci n’est pas sans conséquence sur le coût de l’eau puisque près de 30% de l’eau potabilisée est perdue.
Pour des questions de sécurité, il est donc urgent d’investir massivement dans le renouvellement des conduites d’eau.
Sécurité, mais pas seulement. Cet investissement permettrait de freiner l’augmentation du prix de l’eau.
Ces dernières années, le prix de l’eau a en effet explosé. Le prix du m³ d’eau distribuée par la CILE est calculé sur base de deux critères : le Cout Vérité de Distribution (CVD) et le Coût Vérité d’Assainissement (CVA). Les montants à payer sont liés à la quantité d’eau consommée mais peu progressifs. La tarification actuelle est fixée par compteur et est composée d’une redevance annuelle de (20 x CVD) + (30 x CVA), et d’un prix à la consommation de 1/2 CVD par m³ (pour toute consommation de 0 à 30 m³) et de CVD + CVA par m³ (pour toute consommation de 31 à 5000 m³). Or, le CVD a augmenté de 27% en 7 ans, et le CVA de plus de 75%. Pour 2018 et 2019, la hausse attendue est également conséquente.
La Régionale de Liège du Mouvement Demain propose de revoir la logique tarifaire en tenant compte du nombre de personnes domiciliées dans le logement et en appliquant une tarification plus progressive en fonction du niveau de consommation. Les premiers m³ d’eau par personne seraient gratuits. Mais le remplissage d’une piscine coûterait plus cher qu’aujourd’hui.
D’autres pistes peuvent également être explorées pour faire baisser le prix de l’eau. La transformation du modèle agricole pourrait diminuer la quantité de pesticides et partant le coût de la potabilisation de l’eau. De même, augmenter le taux de production propre réduirait les coûts, puisque l’eau achetée par la CILE coûte beaucoup plus cher que celle qu’elle pompe elle-même.
Dans le coût très important payé par les habitants de 24 communes pour leur eau, la question des dividendes versés aux communes par la CILE n’est pas à négliger. La CILE est en effet devenue une sorte de vache à lait pour les communes. Cette situation n’est pas saine, elle grève les investissements et constitue une injustice pour les usagers de la CILE qui payent une forme d’impôt communal déguisé via le prix de l’eau.
Signalons enfin que le remplacement des canalisations est sans doute l’occasion de penser en même temps à l’installation de réseaux de chaleur tels qu’ils existent déjà dans plusieurs grandes agglomérations européennes (comme Copenhague). L’asbl urbAgora en a formulé la proposition pour Liège.
Communiqué de la régionale de Liège de Demain
[1] A titre de comparaison, le rapport d’activité de Vivaqua annonce un taux de remplacement sur le réseau de distribution de 0.77%. La situation semble donc pire à la CILE. Ce rapport ne donne toutefois pas le rendement du réseau géré par Vivaqua.