Dédicace d’un syndicaliste grec aux européens : « Bienvenue dans la jungle, nous n’étions que cobayes ».

En 2010, la Grèce doit signer un accord de prêt avec l’UE, en échange de profondes réformes, notamment  relatives au marché du travail. En 2012, viennent s’y ajouter deux mémorandum qui sapent les négociations collectives, diminuent les salaires et donnent la primauté́ aux accords d’entreprises.  Un peu plus tard, Alexis Tsipras est contraint à un troisième mémorandum  qui sape les pensions, augmente la flexibilité et précarise encore les travailleurs.

Parallèlement, l’Allemagne introduisait aussi la flexibilisé du marché du travail avec ses « mini-jobs » à 400euros/mois exonérés de charges, ainsi que « les emplois à un euro permettant aux communes de recruter des chômeurs de longue durée pour des travaux d’intérêt général. »

C’est aussi en 2010 que l’Angleterre a introduit ses « contrats zéro heure » ne garantissant aucun revenu fixe alors que le travailleur est lié à l’entreprise et ne peut aller travailler ailleurs. Ce dispositif faisant effectivement baisser les chiffres du chômage !

Affectée d’un taux de chômage supérieur à 20% en 2012, l’Espagne bouleverse également son code du travail dans le sens d’une flexibilité accrue, d’une sortie des conventions collectives au profit de négociation d’entreprises (il est désormais possible de ne pas appliquer les conditions de travail prévues par la convention collective de niveau supérieur même en matière salariale).

En mars 2015, le « job act » italien supprime la protection contre le licenciement et créé un nouveau type de contrat, le CDI « à protection croissante », avec une période d’essai de… trois ans, pendant laquelle l’employeur n’a pas à justifier la rupture du contrat. La réforme des retraites l’avait précédé en 2012.

Ajoutons encore le Portugal (« banque d’heures supplémentaires »,  facilités de licenciement et abaissement des indemnités), la flexisécurité du Danemark (limitation du chômage à 2 ans et faible protection de l’emploi) et le « nouveau pacte social » en discussion en Finlande (allongement du temps de travail, réduction des salaires, augmentation de la part des cotisations salariales personnelles face aux patronales). Réductions encore en Suède (300 jours de chômage max), en Hongrie (record européen de 3 mois de chômage seulement et travaux d’intérêt public obligatoires), etc.

On ne peut nier des points communs dans l’évolution du droit du travail de ces pays. Evolutions emblématiques d’un effacement de la protection des travailleurs au profit de l’entreprise  comme l’acteur principal plutôt que de la Loi comme socle protecteur.

L’entreprise prend donc lentement l’ascendant sur les Conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT) et même sur l’actuelle Charte sociale du Conseil de l’Europe.

A côté de ces réformes au nom de la « compétitivité », on organise une sape des dépenses sociales et diverses privatisations des services publics. Tout est aussi mis en œuvre pour marginaliser les syndicats ou organiser une « concertation sociale » de façade.

Strictement dans la même veine, la France embraie aujourd’hui avec sa Loi Travail XXL imposée par ordonnances.

En Belgique, la Commission des affaires sociales de la Chambre a approuvé en début 2017 la Loi  Peeters permettant aux entreprises beaucoup de souplesse par cycles d’activité : le temps de travail n’est plus calculé par semaine (45heures/semaine sont permises) mais par an, le temps partiel devient flexible avec des appels en dernière minute et les heures supplémentaires stockées (pas forcément en sursalaire) ainsi que diverses autres dérogations.

En termes évanescents, cela est décrit comme « un menu avec des mesures dont pourront s’emparer les secteurs professionnels. Ce menu se définit en deux grands chapitres, le «travail maniable» qui porte sur la flexibilité et le «travail faisable» visant à réduire le stress et le burn-out, offrir la possibilité d’allonger les carrières et augmenter la compétitivité des entreprises. » (L’Avenir.net).

Fin juillet, le gouvernement s’est mis d’accord sur diverses mesures inscrites au calendrier d’octobre-novembre 2017.

  • Extension à d’autres secteurs que l’HORECA des « flexi-jobs » qui permettent un contrat « à la carte » avec horaire très étendu pour un salaire minimal. Lesquels flexi-jobs seraient aussi ouverts aux pensionnés.
  • Réglementation (sans charges sociales jusqu’à un certain plafond) des jobs type « Uber ».
  • Révision du statut des fonctionnaires (moins de protection).
  • Levée des restrictions à l’intérim.
  • Révision du calcul de pension des prépensionnés et pensions à points.

A court terme, la mobilisation sociale semble au point mort  en Belgique même si une « concentration » syndicale est annoncée le 20 septembre à Namur et une grève nationale le 10 octobre, axée sur l’emploi et les pensions dans les services publics.

A plus long terme, les mouvements citoyens comme DEMAIN rassemblent leurs forces pour s’opposer à ces détricotages qui détruisent notre société sans apporter aucune solution pérenne aux problèmes qu’ils prétendent solutionner.

Au niveau européen, MARQUONS NOTRE SOLIDARITE AVEC LA France qui descend dans ses villes en ce mois de septembre.

Une opinion de France Lhoir

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