La nouvelle a fait l’effet d’une bombe ce mardi 19 janvier : Fedex-TNT va délocaliser de Liège vers Paris plus d’un tiers de son activité. En conséquence, 671 emplois sur 1 826 sont en passe d’être supprimés. Ni les investissements massifs de la Région Wallonne à Liège Airport, ni l’autorisation de voler 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, ni un probable montage très discutable avec un bail emphytéotique sur les bâtiments permettant à la multinationale d’éluder le précompte immobilier, ni les efforts de productivité incessants des travailleurs n’auront suffi. A terme, c’est bien l’entièreté des activités du groupe à Liège qui est menacée.
Cette délocalisation correspond à une logique propre à la multinationale et ne présage pas forcément d’une évolution dans le secteur du fret aérien qui a d’ailleurs connu une année 2020 assez faste. Mais elle démontre toutefois combien ce type d’activité est précaire car facilement délocalisable au gré des intérêts d’une multinationale. Il est également piquant de constater qu’ADPm (Aéroports De Paris management) qui va bénéficier de cette délocalisation sur Paris des activités est le second actionnaire de Liege Airport.
En faisant de la logistique par avion un pôle majeur de son redéploiement, notre Région a fait une énorme erreur de redéploiement industriel. C’est un secteur polluant, non viable à terme, et très délocalisable. Notre mouvement politique l’affirme depuis des années. Aujourd’hui, c’est une réorganisation, demain ce seront la robotisation ou le coût du transport (hyper polluant) par avion qui frapperont avec les mêmes effets socialement catastrophiques.
Il faut changer de cap tant que c’est encore possible. De l’argent public, celui déversé à profusion pour développer cet aéroport plus que de raison les dernières années, sera perdu. Mais continuer dans la même voie et continuer de miser sur la logistique serait pire encore.
Nous tenons à témoigner de notre totale solidarité avec les travailleurs de Fedex-TNT et les familles qui vont être touchées. Il va falloir se battre, syndicats et forces politiques rouges et vertes, pour faire payer Fedex-TNT. Si des aides financières ont été accordées par la Région (crédits d’impôt, etc), elles devront être remboursées.
Mais il va aussi falloir à moyen terme réorienter notre économie vers des secteurs soutenables écologiquement et non délocalisables. C’est possible. Le pire serait, comme pour la sidérurgie, de continuer d’aider des multinationales de ce secteur nuisible, sans stratégie économique publique alternative. Dans cet esprit, il est possible de créer du travail de meilleure qualité dans des secteurs industriels traditionnels : transports, électronique, métallurgie, pharmacie. Mais aussi dans des secteurs qui répondent aux besoins de notre époque : énergies renouvelables, agriculture, alimentation, construction et isolation, manufactures locales et artisanat.
Le mouvement Demain réclame une étude indépendante sur les « coûts-bénéfices” des investissements publics consentis à Liege Airport. Au-delà même du nombre d’emplois sur le site et de leur précarité, il faut aujourd’hui objectiver le débat et internaliser tous les coûts induits par l’aéroport. Le temps de l’indignation impuissante du monde politique doit être révolu.
Plus globalement, c’est une question de souveraineté très grave qui nous est également posée. Si nous sommes opposés à l’arrivée d’Alibaba et à l’extension de Liege Airport c’est bien parce que ce mode de développement nous pose un problème d’un point de vue écologique, d’un point de vue social et du point de vue de l’indépendance nationale. Mais c’est aux autorités belges et wallonnes qu’il revient de prendre la décision -et leurs choix jusqu’à maintenant ne nous rassurent pas- et ce n’est pas à une multinationale américaine aujourd’hui ou chinoise demain de décider pour nous, avec qui nous construisons des partenariats économiques, commerciaux et industriels.
Communiqué fédéral du 20 janvier 2021