Le droit de manifester, pierre angulaire de la démocratie, est actuellement confronté à de sérieuses menaces. Le projet du gouvernement visant à instaurer une peine complémentaire d’interdiction judiciaire du droit de manifester a suscité une vive inquiétude, tant de la part de la Ligue des droits humains, que de l’Institut fédéral des droits humains. Cette mesure suscite une levée de boucliers parmi les syndicats et certains mouvements parmi lesquels le Mouvement Demain, tandis que PS et Ecolo – membres du gouvernement – se terrent quant à eux dans le silence.

De plus, les condamnations judiciaires des piquets de grève dans le conflit social chez Delhaize et la condamnation de responsables syndicaux pour le blocage du viaduc de Cheratte témoignent d’une répression croissante à l’encontre des mouvements sociaux. Pourtant, il est essentiel de rappeler que la conflictualité fait partie intégrante de la démocratie ainsi qu’en témoignent les luttes sociales passées. Plus que jamais, nous affirmons que les mouvements sociaux et les manifestations jouent un rôle clé en mettant en lumière les injustices et en poussant au progrès social.

Par ailleurs, la violence dénoncée en ce moment par le gouvernement, où se situe-t-elle réellement dans notre société? Est-ce celle des citoyens manifestants ou celle des décideurs économiques qui jouent avec les vies des travailleurs en les considérant comme des variables d’ajustement et en s’estimant légitimes pour choisir qui a le droit de vivre dignement? L’augmentation des statuts précaires, l’incertitude face au quotidien, la privation de besoins essentiels (se soigner par exemple), n’est-ce pas cela qui est violent et contraire aux droits humains parmi lequel le droit à la dignité humaine?

Qui plus est, entre la multiplication des incivilités et les nombreux problèmes liés aux narco-trafics qui augmentent l’insécurité réelle, l’urgence n’est-elle pas ailleurs que dans la surveillance des mouvements sociaux? Les moyens déjà insuffisants alloués à la Justice ne seraient-ils pas mieux affectés dans le maintien de la sécurité réelle et dans la volonté de garantir à toutes et tous une vie paisible, c’est-à-dire soulagée de ces violences directes et prégnantes, que ce soit dans l’espace public ou privé – car la lutte contre les violences intra-familiales n’est pas non plus une question à négliger – ?

Si un Etat de droit n’est pas nécessairement démocratique, une démocratie ne peut exister en dehors de l’Etat de droit. Ce dernier en Belgique est en péril : en effet, non seulement le gouvernement ne respecte pas le droit et ne se conforme pas aux décisions de justice prononcées à son encontre mais de plus le parlement ne joue pas sérieusement son rôle de contrôle du pouvoir exécutif.

Parce que l’Etat de droit et la démocratie sont au fondement de notre projet, notre Mouvement écosocialiste – que nous vous présentons en vidéo dans cette newsletter – considère que la Belgique doit s’inspirer de l’Autorité autonome du Nord et de l’Est de la Syrie (Rojava) qui est une démocratie s’organisant depuis une unité de base – la commune – multiculturelle et écologique où l’égalité des genres est garantie et dont l’économie opère une transition vers un modèle coopératif.

Notre Mouvement condamne en outre le pouvoir colonial et militaire israélien dirigé par un gouvernement de droite extrême qui s’exerce sur les Palestiniens. Nous pensons qu’une « diplomatie laïque active » et protectrice des droits humains manque cruellement.

Enfin, si la Belgique est l’un des pays les plus avancés en ce qui concerne les droits LGBTQIA+, c’est bien en raison de la force de ses mouvements sociaux et du rôle essentiel du droit de manifester.

Dans le fond, toute la question est là : comment mettons-nous les moyens en œuvre pour garantir à toutes et tous une vie digne, décente et paisible? Quels moyens pour construire cette société où nous serions socialement égaux, humainement différents, tous libres? Quelle autre façon, à l’heure actuelle, de poser cette exigence, à part la manifestation?

 

Nota bene : Retrouvez avec chaque éditorial, une illustration originale de notre amie Frédéricque Bigonville

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