Un hommage de Paul-Emile Dupret.

 

Nous avons appris avec une énorme tristesse le décès, ce lundi 30 Mars, de Manolis Glezos, ce magnifique combattant anti-fasciste que j’ai eu la grande chance de le connaître au Parlement européen, où comme élu de Syriza, il a notamment appuyé avec grand enthousiasme nos diverses actions contre le TTIP et autres menées dans l’hémicycle.

Manolis, à 19 ans, avait décroché le drapeau nazi de l’Acropole dans la nuit du 30 Mai 1941, quelques semaines après le début de l’occupation allemande, ce qui avait fortement encouragé la résistance des athéniens.

Comme résistant communiste à l’époque, il sera arrêté par les allemands, puis par les italiens, puis par des collaborateurs grecs, et dût aussi s’affronter aux occupants anglais prompts à pactiser avec les collaborateurs grecs pour briser la résistance communiste. Son frère Nicos, résistant comme lui, sera exécuté en Mai 1944.  

Continuant son combat anti-fasciste, Manolis sera condamné à mort deux fois durant la guerre civile, puis il sera libéré en 1954, à nouveau arrêté en 1958 puis libéré jusqu’en 1962. Il sera de nouveau emprisonné de manière préventive dès le déclenchement du coup d’État des colonels.

Il a quitté le parti communiste et a toujours cherché à construire une gauche non-dogmatique et combattante.

Comme mouvement éco-socialiste*, nous l’avions invité peu avant la victoire de Syriza, pour analyser la situation politique en Grèce et en Europe, avec Eric Toussaint du CADTM et Juan Sanchez de Podemos. Peu de temps après il m’a demandé un morceau de charbon belge pour le musée géologique qu’il a ouvert dans la ville d’Apiranthos, sur l’ile de Naxos, dans laquelle il appliquait une sorte de démocratie directe. Pour ce faire nous avions visité le charbonnage de Marcinelle où il a été très intéressé par le sort des mineurs grecs migrants victimes de l’exploitation inhumaine dans cette mine.

Ensuite, durant l’été durant lequel il a commencé à se distancier doucement de Syriza – après la victoire du OXI et néanmoins l’application du plan de la Troïka -, je lui avais rendu visite en Grèce, et il nous avait fait connaître la ville de Naoussa, sur l’île de Paros, une visite qui avait fasciné ma compagne, mais aussi mon fils pourtant adolescent à cette époque. Il était si connu, que parfois des passants lui demandaient de prendre une photo en sa compagnie. Il demandait alors un euro par photo, qu’il glissait dans une poche spéciale de son pantalon, en précisant au passant étonné que c’était pour acheter des livres pour la bibliothèque de sa ville.

Orateur hors pair, il arrivait parfois à Manolis de réciter des citations de grec ancien dans la plénière du Parlement européen pour fustiger la Commission européenne, ce qui créait évidemment la panique au sein des interprètes.  

Il était extrêmement humain, et racontait notamment les longues conversations qu’il avait eu avec ses gardiens de prison, par exemple sur la thème de la liberté, la sienne, réelle, et celle, fictive, de ses geôliers. Nous avons une pensée très spéciale aussi pour sa magnifique compagne, Georgia Argyropoulou, avec laquelle ma compagne et moi-même avions des conversations animées puisqu’elle est spécialiste de littérature latino-américaine.

La ténacité, la décision et la force intérieure de Manolis est un magnifique exemple pour tous les démocrates, défenseurs des libertés et tous les progressistes, au travers desquels il restera vivant pour toujours.

Respect !

 

(*) En tant que Mouvement VEGA, avant la fusion avec le Mouvement de Gauche qui donnera naissance à l’actuel Mouvement Demain.

Illustrations de Kristien Pottie

 

 

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